« La Sarabande »: une soirée costumée autour de la Renaissance

Compte-rendu:

Ce soir-là, changement de « décor », si l’on peut dire: un ensemble de 7 musiciens costumés d’après les costumes de cour du XVIe siècle à la cour de France, s’est piqué de nous proposer un « concert-spectacle ». Certes, l’espace était très restreint pour qu’ils puissent réellement danser, mais… quelques mouvements donnent déjà une idée, faute de mieux…

C’est que cet ensemble, rassemblant des passionnés de musique de la Renaissance issus du cantons de Vaud, se pique de vouloir pratiquer la musique instrumentale, le chant …et la danse de la Renaissance française ! Le programme exécuté permet aux artistes d’offrir diverses combinaisons instrumentales, mêlant parfois le chant aux instruments, et quelques instrumentistes accompagnant quelques danseurs.

Les musiciens de La Sarabande sont Jean-Marc Aubert, flûtes à bec, chalémie, dulciane basse, psaltérion et chant; Hélène Aubert, flûtes à bec, vielle à roue, flûte (à trois trous) et tambour, psaltérion et chant; Denise Rütishauser, flûtes à bec; Yves Marx, flûtes à bec et chant; Hanna Marcquart, flûtes à bec, viole de gambe et chant; …votre serviteur, Pierre-Alain Beffa, flûtes à bec, clavecin et chant; …votre servante, Françoise Cap Beffa, flûtes à bec, archiluth, psaltérion et chant; tous les membres dansant par ailleurs… Vous constaterez que les artistes ont en commun le chant, la pratique des flûtes à bec et la danse. La plupart d’entre eux joue en outre d’autres instruments.

Pari délicat, pari d’autant plus risqué que tous ces musiciens sont amateurs, même s’ils pratiquent ce répertoire depuis fort longtemps. En outre, leur niveau « technique » dans chaque instrument, le chant et la danse est variable… La Sarabande a choisi de faire fi de …ce défi en proposant justement plutôt la diversité que l’excellence. S’il avait fallu choisir, se concentrer sur beaucoup moins d’instruments et de combinaisons musicales, serait malgré tout apparue la diversité de capacité entre les membres, alors qu’en offrant la diversité des combinaisons instrumentales, on préfère la …divesrité du répertoire à l’excellence, encore une fois.

Cela implique que la prestation de l’ensemble n’a pas été exempte d’approximations et de quelques flottements, même si cette prestation a fait l’objet d’une longue et minutieuse préparation.

S’auto-programmer à La Goulue est bien entendu risqué, d’autant plus que chez soi, jouer face à un public en partie constitué de connaissances, constitue un exercice parfois plus périlleux que de se produire devant un public « anonyme » parce qu’inconnu… L’exercice était d’autant plus risqué que l’acoustique de La Goulue est impitoyable, surtout que la salle était pleine, qu’il n’y avait donc pas la moindre réverbération du son…

La « soirée » (à cette saison et à cette heure, il faisait encore largement jour dehors) a débuté par une entrée en musique et en cortège depuis l’étage supérieur, avant que le maître de céans, pour une fois n’annonçant pas les « informations officielles », fasse la présentation du programme musical. Si l’entrée s’était faite par le jeu d’une suite de danses tirées de « L’Orchesographie » de Toinot Arbeau, La Sarabande a suivi avec un enchaînement de pièces composées sur la célèbre mélodie chantée dans toute l’Europe avec des titres divers: « Une jeune Fillette ». La première version a été chantée à 4 voix, puis s’en est ensuivie une suite de variations pour consort de flûtes à bec d’Eustache Du Caurroy, avant de parachever l’exercice avec une pièce tirée du Fitzwilliam Virginal Book, « The Queen’s Alman », de William Byrd, jouée au clavecin par votre serviteur.

Les danses ont été l’occasion, au XVIe siècle, de jouer de nombreuses compositions très simples, souvent anonymes parce qu’initialement « empruntées » au répertoire populaire. Nous avons donc eu droit d’abord à une pavane, sur une autre chanson: « Au joly Boys ». Puis une « Allemande d’amours », ces pièces étant jouées avec diverses combinaisons instrumentales. Puis retour au consort de flûtes à bec, avec une suite de danses du compositeur anglais Anthony Holborne, à 5 voix.

Tout en restant dans le répertoire anglais, deux pièces s’enchaînant de suite, toutes deux de John Dowland, la « Pavane « Sir henry Upton’s Funerall », suivie de « The Earl of Essex’s Galliard ». L’occasion d’entendre l’archiluth de mon épouse Françoise. Un saut de puce vers l’Italie, avec une « Passacaglia » de Biaggio Marini, suivie d’une sonate de Dario Castello, aux flûtes à bec et clavecin.

Retour du chant pour finir, toujours en Italie, avec une chanson à couplets anonyme: « So ben mi ch’a bon tempo », où le quatuor vocal s’est enrichi de quelques interventions instrumentales pour souligner le sens particulier de certains couplets… Cette pièce, très ironique et moqueuse, bien enlevée par surcroit, était idéale pour achever cette soirée musicale.